La parole, présence vivante et incarnée où s’articule, dans sa singularité, une voix, révèle et tout à la fois excède le langage. En tant qu’elle parle de, elle suppose un objet auquel elle se rapporte sur un mode représentationnel ou désignatif, et manifeste une dimension d’ouverture susceptible d’être évaluée quant à sa vérité. En tant qu’elle parle pour, elle engage un sujet qui, se réalisant et se découvrant par l’expression, met en jeu son authenticité et sa responsabilité. En tant qu’elle parle à, elle s’adresse à un destinataire, sous la forme d’un appel, par où s’établit la possibilité d’un dialogue et de la communication. L’étude de la parole exigera donc de faire jouer divers champs philosophiques afin de rendre compte de la diversité des questions ontologiques, épistémologiques, éthiques et anthropologiques qu’elle soulève. Comment la parole se constitue-t-elle dans la matérialité de notre corps et de notre voix ? Comment passer de ce qui semble nous être transmis comme une faculté innée à un exercice effectif ? Quels sont les liens entre ce qui est dit et ce que la parole vise ? Quel rapport entre une énonciation se voulant singulière et unique et le recours à la langue, moyen d’expression partagé, conventionnalisé et réglé ? En quoi la parole est-elle aussi un acte qui nous oblige et peut-elle devenir un engagement auquel il faut se tenir ? En quoi le langage parlé, par sa variété et ses couleurs, peut-il se faire le reflet d’une diversité sociale ? Comment expliquer le rapport étroit entre la parole et les rites, la force du verbe et son affinité avec le mythe et la légende ? Autant de questions que nous aborderons dans ce cours, en tentant de saisir la parole dans sa pluralité et dans son originalité propre.