Le sujet des migrations fait souvent la une de l’actualité médiatique et politique, mais les expériences vécues des migrant.e.s sont la plupart du temps laissées dans l’ombre. Les approches socio-anthropologique, qui ont pour point commun de retranscrire le vécu des migrant.e.s, constitueront a contrario la manière privilégiée de ce cours d’étudier les multiples facettes des migrations, que sont les parcours migratoires, les enjeux des politiques migratoires et de frontiérisation de l’Europe, les effets quotidiens des politiques d’accueil, le travail des migrant.e.s ou encore l’organisation associative et institutionnelle de l’aide.  A partir de ces différentes facettes, où les études migratoires croisent les études urbaines, de genre, de sociologie du travail ou de l’action publique, les principaux débats théoriques de la sociologie et de l’anthropologie des migrations seront abordés, notamment à partir des articulations entre la place à accorder à l’acteur et celle à accorder aux structures sociales, ou entre les catégories administratives et les rapports sociaux.

La première séance sera consacrée à une analyse critique des catégories administratives utilisées pour nommer et classer les migrant.e.s. En travaillant sur l’évolution du sens apporté à ces catégories, nous verrons aussi que distinguer entre « bon » et « mauvais » migrant.e.s, ou entre « réfugié.e.s politiques » et « migrant.e.s économiques », comme on distingue le bon grain de l’ivraie, est impossible : il n’existe pas d’essence du réfugié. Ces distinctions permettront de travailler sur différents enjeux politiques et sociaux et sur leur rôle sur le quotidien des migrant.e.s.

Les huit autres séances seront articulées en quatre séquences successives. Dans la première, il sera question des politiques migratoires, depuis leur application aux frontières de l’Europe jusqu’aux politiques de dispersion en France en en Allemagne, qui jouent un rôle important sur l’appréhension des villes par les exilé.e.s. Dans la deuxième, sera étudiée la question du travail des migrants. La lecture de travaux fondateurs d’Abdelmalek Sayad sur les ouvriers immigrés en France permettra en premier lieu d’aborder la manière dont la sociologie des migrations s’est constituée comme un domaine autonome dans la sociologie française. En second lieu, la persistance de l’importance du travail dans le quotidien des migrant.e.s sera travaillée à partir d’enquêtes ethnographiques récentes dans différents pays européens. Une troisième séquence sera consacrée aux recompositions de genre en situation de migration. On traitera autant des difficultés pour les personnes qui migrent de parvenir à déployer une sphère intime que des perceptions souvent caricaturales du genre de la part des institutions, avec par exemple des femmes qui doivent apparaitre comme « vulnérables » pour avoir de meilleures chances d’être aidées. La quatrième séquence sera consacrée à l’étude de l’organisation de l’aide aux migrant.e.s, en se concentrant sur le travail social et le bénévolat, et de la réception de cette aide par les migrant.e.s eux et elles-mêmes. Cette dernière séquence sera aussi l’occasion d’insister sur des questions méthodologiques et d’éthique de la recherche, sur des sujets déformés par les discours politiques et médiatiques, et souvent en lien avec des personnes vulnérables.