La philosophie occidentale est pendant longtemps marquée par une opposition entre le sujet pensant et le monde qu'il pense. Sujet/objet, esprit/matière, humain/non-humain, culture/nature : ces couples d'opposés structurent la pensée européenne moderne au moins depuis Descartes.

Mais ce modèle est mis à mal au XXème siècle : on voit alors émerger l'idée que le sujet pensant n'existe pas à part de la réalité qu'il pense. Sujet et objet, humain et non-humain, culture et nature se trouvent mis sur le même plan, ce qui ouvre la voie à une critique générale des modalités de la pensée moderne. Ce revirement conceptuel aura une influence au-delà du seul champ de la philosophie, et notamment en politique : si la conception moderne de la politique considérait les seuls rapports entre des sujets humains abstraits de leur environnement, la mise en lumière de l’implication mutuelle de l'humain et du non-humain impose la prise en compte, dans le champ de la politique, d'objets nouveaux (politique environnemental, droit animal, etc.), et de secteurs d'activités qu'on considérait auparavant comme non politiques (par ex. redéfinition de la place des sciences et des techniques).

En outre, cette remise en question du paradigme dualiste de la pensée moderne a ouvert la voir à une réflexion nouvelle sur le statut de la pensée occidentale : la cosmologie moderne, qui place d’un côté le sujet pensant et de l’autre le monde matériel, ne constitue qu’une manière parmi d’autres de composer le monde, et il n’y a pas lieu de lui accorder un quelconque privilège.

Ce cours vise ainsi, à travers la question de l'opposition entre nature et culture, à étudier la manière dont un certain modèle conceptuel abstrait peut présenter des implications concrètes dans la manière de comprendre les modalités de la pratique humaine.